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24 septembre 2009 4 24 /09 /septembre /2009 20:56
Voici un article que le responsable de l'ANAC (Association des navigants de la communauté européenne) a voulu faire paraitre dans le journal LE MARIN, sans succès :
Je cite :

"Texte proposé au journal Le Marin du 18 septembre 2009 pour être diffusé.

Censuré. Ce n’est pas la première fois.

 

Point de vue                                                              Lundi 14 septembre  2009

 

Le paradis perdu : la grande illusion

 

            En ce qui concerne l’affaire de la SNRH (Société nouvelle de remorquage du Havre), prenant mes responsabilités, je donne le point de vue d’un des responsables des associations maritimes nationales ou internationales qui subissent la réserve à leur encontre des syndicats ; parfois à juste titre. L’association prend souvent en compte ce que le syndicat rejette, faute de temps ou de connaissance.

            Ce que je craignais dès les débuts de la SNRH, le combat fratricide maritime, est arrivé. L’ours du sérail SNRH a regardé par-dessus le mur et a aperçu l’ours de Bourbon (devenu Boluda) bien dodu, ce qui a suscité son envie et le mal être dans sa compagnie qui n’en avait pas besoin.

            Bien que précisant à nos adhérents que la SNRH ne pouvait pas fournir le même statut qu’une boîte centenaire comme Bourbon, leur syndicat maison se constituant une belle pelote grâce à un syndicalisme de proximité impératif et égoïste. Dans la marine marchande, plus longtemps les marins étaient absents, moins ils avaient d’avantages ; les absent ont toujours tort.

Ce que notre association recherche, c’est le CDI (contrat à durée indéterminée) afin de favoriser les prêts bancaires permettant d’accéder à la propriété pour élever ses enfants et assurer ses vieux jours. Les reproches envers la direction de la SNRH ressemblent fort aux gémissements des Israélites dans le désert regrettant les oignons verts et les piments des marchés d’Egypte.

            Au plan de l’emploi maritime, où en sommes-nous aujourd’hui ? 200 bateaux sont au Rif (Registre international français) qui ne recrutent à l’équipage que des Philippins et consorts. Reste l’offshore où il faut être au dessous des premières rides, jeune, endurant, compétent pont et machine, souple pour rester au chômage, le temps d’un nouvel embarquement hypothétique.

            Il reste les passages d’eau d’avril à septembre ; après, c’est l’inscription à l’ANPE et au BCMOM (Bureau central de la main d’œuvre maritime) à Paris. D’autres navires de servitude ont les mêmes exigences, sans CDI généralisé.

            En fin de compte, il n’y pas grand-chose pour s’assurer un avenir maritime honorable pérenne. Du côté des officiers, les marins de formation supérieure ont tout de même des propositions en général correctes au niveau de l’emploi. Sils n’habitent pas Marseille ou Le Havre, seuls des parents financièrement aisés peuvent envoyer leurs enfants aux cours.

Je connais bien l’histoire de la Bretagne. C’est la première fois que les matelots, ouvriers et maîtres se voient refuser d’embarquer au long cours sur des navires dits français immatriculés à Marseille. Quant aux officiers, l’évaporation au profit du pilotage, du remorquage et des emplois à terre est bien connue.

 La culture marine marchande est morte à l’égal d’autres cultures, les jeux électroniques en étant une des causes.

Voilà le point de midi aujourd’hui : c’est la chanson de l’alors ravissante Danièle Darrieux « Le Paradis perdu » et le film magistralement interprété par Eric von Stroheim et Pierre Fresnay : « La grande illusion ». La ligne bleue des Vosges à disparue, c’est la ligne de la Finlande avec les rennes; Eric von Stroheim, c’est l’armateur terre-à-terre qui bâtit des tours de Babel financières d’avance condamnées par le bon sens ; et Pierre Fresnay, c’est le marin qui croit au père Noël : le droit est européen, la pratique est, légalement, à la sauce hollandaise. Ou alors, où est le droit s’il est différent au Havre et à Rotterdam ?

Dans l’immédiate après guerre, on naviguait sans complexe dans des petites compagnies, éloigné de son domicile pendant une année. On se sacrifiait durement pour fonder famille, maison et achats de livres indispensables pour s’informer. Tout était franco-français dans un empire hyper protégé ; aujourd’hui, c’est européen et il faut partager avec les pays les plus pauvres. Dur, dur.

Pour embarquer au remorquage, il fallait au moins une lignée de parents ayant pratiqué cette profession  au temps d’Abraham. Les « gros » brevetés ont remplacé les « petits brevetés » maintenant au chômage parce que les places au long cours délaissés par leurs collègues leur sont inaccessibles.

Notre philosophie associative est qu’il n’y a rien de trop beau en documentation moderne pour nos adhérents. Et rien ne vaut le sacrifice d’assurer la survie de notre patrimoine, remisé dans un coin, sauf, c’est un exemple, dans un journal comme « Le Marin » qui n’hésite pas à traiter systématiquement de  la mémoire de l’histoire depuis 1980 : 30 années d’articles précieux ! Sans oublier les revues mensuelles brillantes qui nous sont consacrées. Nous-mêmes nous assurons notre vécu depuis 1945.

C’est dans cet esprit que nous avons souvent sollicité m. Pascal Riteau, directeur de la SNRH que je connais bien depuis de nombreuses années. C’est un marin avisé qui travaille avec les moyens du bord, pas du tout l’aspect du personnage qu’on lui prête devenu le bouc émissaire idéal. Hier, c’était dans notre métier le lac Léman au repos ; aujourd’hui, chacun le sait, c’est le gros temps comme pour un navire descendant la Seine et abordant la rade du Havre secouée par les rafales, route sur Ouessant.

Je salue le courage, bien que téméraire, de m. Bourgeois. Le syndicalisme ? Oui, mais pas maison au point de refuser toute concurrence et de tuer la poule aux œufs d’or ; les capitaux des compagnies européennes, à défaut d’être françaises par frilosité, nous sont indispensables. Le souci dans notre association maritime, c’est le service aux candidats à la profession maritime et à ceux en recherche d’emploi. Il est difficile d’aller plus bas et nous avons apprécié les emplois de la SNRH.

 

Roger Courland, président de l’Association des navigants de la communauté européenne (ANAC)

 

ANAC

BP 217

22504 PAIMPOL CEDEX"

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commentaires

J
<br /> Cher Monsieur Bourgeois,<br /> <br /> On peut en effet être en désaccord sur la politique (syndicale en l'occurrence) et par ailleurs avoir une discussion productive et intéressante, j'espère, sur d'autres sujets. J'ai bien aimé<br /> l'article sur la productivité comparée des ports du Havre et de Rotterdam. Ayant moi-même travaillé sur le sujet pour mon ancien employeur, un acteur majeur dans les terminaux de conteneurs, j'ai<br /> eu l'occasion de comparer quelques chiffres.<br /> <br /> Je suis entièrement d'accord sur la question de l'émiettement des terminaux. Bien que les photos sur le site reformeportuaire ne montrent qu'une partie des terminaux dans les deux ports, il est<br /> clair que les grands terminaux néerlandais ont une surface utile et une longueur de quai bien supérieures à ceux du Havre. Cela dit, je me dois de faire remarquer que la productivité horaire par<br /> grue au Havre est nettement inférieure à celle de Rotterdam. Autrement dit, le grutier français travaille (un peu) plus lentement et ses équipements sont (un peu) inférieurs en qualité. Cela ne<br /> suffirait pas à faire fuir les armateurs. Malheureusement, le problème du Havre n'est pas tant sa productivité, c'est sa réputation catastrophique dans le monde maritime, surpassée seulement par<br /> celle de Marseille. Contrairement à d'autres ports, comme celuide Dunkerque, par exemple, Le Havre était connu pour ses grèves à répétition, très dures, et pour le mauvais service fourni par les<br /> employés locaux.<br /> <br /> La situation a sans doute changé, et je suis sûr que l'arrivée de la SRNH ou la création de Port 2000 ont pu contribuer à une amélioration, en apportant de la concurrence. Mais les perceptions et<br /> l'image restent...<br /> <br /> Un dernier point, les images peuvent être trompeuses dans les deux sens. Il y a plus d'opérateurs de terminaux différents à Rotterdam qu'au Havre. Un terminal comme celui de Maasvlakte (celui de la<br /> photo) a en fait trois opérateurs différents: APMT, ECT et Kramer. Par ailleurs, les autres terminaux du port, en amont, sont beaucoup plus nombreux encore et certainement plus dispersés en termes<br /> d'opérateurs que ceux du Havre.<br /> <br /> Voilà, j'espère que cela aura modestement contribué à la discussion...<br /> Bien cordialement.<br /> <br /> <br />
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A
<br /> Pour Jean Baptiste<br />  Je note que danbs votre blog vous déclarez:<br /> <br /> "First, I'd like to say that I never was a fan of Mister Sarkozy. I didn't vote for him in the last elections and I have no particular sympathy for him neither for his party. He is in general way<br /> too conservative for me, focusing largely on security rather than justice, business rather than people and image rather than content."<br /> <br /> Décidément je crois qu'il faut qu'on se rencontre.<br /> Je vois que le maritime vous intéresse je vous renvois donc sur ce blog<br /> <br /> http://reformeportuaire.wordpress.com<br /> <br /> Vous y découvrirez pourquoi le Havre ne sera jamais "globalement" aussi compétitif que Rotterdam.(A moins de changement trés trés couteux).Vous y verrez le petit esprit Français qui gouverne les<br /> dirigeants du port et qui nuisent à l'intérêt général en essayant de faire plaisir à tous les petits copains.<br /> <br /> A bientôt,<br /> <br /> J'espère.<br /> <br /> <br />
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A
<br /> Le commentaire Précédent renvoit sur le site de "Jean Baptiste" sur lequelon peut lire "Let's say that I am French, living in the Netherlands and with broad interests. I am fond of discussions<br /> about international politics, philosophy, economics and literature, but am open to any other topic, preferably controversial."<br /> Pour ma part je trouve que ce Jean Baptiste est de ce fait un homme ouvert.Il oppose au corporatisme franco-français sa vision "open mind".Sur ce point je le rejoins, pas de gauche, ni de droite ,<br /> que des gens qui voyagent et d'autres pas.<br /> Il y a évidemment et forcément un "mais".<br /> Mais Jean Baptiste ne peut s'opposer à ce que des lois soient établies par un parlement.Que ces lois établies certe, peuvent évoluer, mais que dans tous les cas un individu , une société privée, ne<br /> peuvent imposer leurs règles de manière outrancière.<br /> Or c'est le cas de la SNRH.<br /> Je lui pardonne, il n'est pas à fond dans le sujet.<br /> A bientôt , Jean Baptiste et eu plaisir de te rencontrer.<br /> <br /> <br />
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L
<br /> Il y a une phrase tout de même incroyable dans le commentaire de M. Bourgeois, celle où il dit lui même : "Que ces lois établies certe, peuvent évoluer, mais que dans tous les cas un individu , une<br /> société privée, ne peuvent imposer leurs règles de manière outrancière."<br /> <br /> Or, qu'est ce qu'on fait les ABeilles/Bourbon fin 2005/ Janv 2006 sinon imposer leurs propres règles à l'ensemble de la profession avec la bénédiction qui plus est de syndicats qui n'ont<br /> pas eu peur de se compromettre en signant l'accord cadre ?<br /> <br /> <br />
J
<br /> C'est un article intéressant, qui montre un autre aspect de la polémique. Le point de vue des marins. Merci pour cet article.<br /> <br /> <br />
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L
<br /> Sauf que le pauvre M. Courland a mis le pied dans le monde impitoyable du remorquage et que les insultes n'ont pas tardé à pleuvoir....<br /> <br /> <br />